Il n’y a, au fond, que deux sortes de poètes, les sédentaires et les autres, les nomades auxquels appartient assurément Philippe Leuckx. Si certains s’enorgueillissent du chant des pistes, c’est du côté plus ombrageux des ruelles de la ville qu’il faut chercher les pas du poète. Venelles sombres débouchant sur une artère plus large, sur un quai de gare ou de port. Quand la nuit tombe sur la cité, Philippe Leuckx s’éveille ! Arpenteur inlassable, il parvient à dénicher derrière une porte, un porche, dans l’encoignure d’une façade, le langage subtil des murs gorgés de souvenirs et de rumeurs. Le murmure des villes résonne à l’oreille du poète qui use des sonorités allitératives ou assonantes du poème, le plus souvent, pour en rendre l’écho particulier.…
L’enfance est fragile, Philippe Leuckx le sait. La sienne et la nôtre. « On devine encore l’été avec ces reliefs d’ombre et et de lumière, ces pans livrés à l’œil qui recèle l’inédit./On voudrait jouer de cet été qui proroge ses marques ». Et, plus loin, « Mais que faire d’un nom / Qui ne soit pas celui / d’un amour perdu ? / Les ruelles sont pleines de cris de ferveurs / de rumeurs sans retour. »Philippe Leuckx, au hasard des rues (méditerranéennes, surtout, il faut voir sa passion pour Rome), redécouvre pour ses lecteurs la délicatesse intime des choses, et nous offre des souvenirs aussi vrais que ceux que nous aurions vécus.Les ruelles montent vers la nuit, dit-il dans cet opuscule à la forme libre, rehaussé fort à propos par une vignette de couverture…
Il y a tant de maisons en nous : habitées, inhabitées, hantées, rêvées, aimées, regrettées…. Un homme est fait d’amour et probablement encore plus de maisons. Elles furent de différentes formes : le terrier la grotte, la hutte, la masure, …si précieuses qu’il fallut leurs consacrer des dieux…Philippe Leuckx partage les siennes… Maisons habitées son dernier recueil en date est composé en deux parties. « J’assume mes greniers » et « La maison, les gravats ». Deux mouvements, celui de la mémoire et de la disparition.Paul Claudel écrivait qu’en chaque homme il y a un grenier, un salon et une cave. Cette réflexion m’a toujours permis de distinguer dans la littérature les textes de la légèreté et ceux de l’innocence. La…
Près du Palais de Justice à Bruxelles, le long du tribunal d’application des peines cognant avec la Place Louise, l’on voit une flopée de cartons fixant le domicile de personnes sans. Puis ils disparaissent, reparaissent, disparaissent, réapparaissent. C’est ainsi tout l’année et j’ai souvent voulu m’approcher, poser une question banale, nouer contact, exprimer je ne sais pas quoi ; une solidarité, je suppose. Mais nos yeux, s’ils se sont croisés, ne se sont jamais rencontrés. Alors, chaque fois, de la tristesse me coulait un peu dans les veines, mon visage se tournait vers le sol, et je reprenais mon chemin, m’interrogeant le cœur.Ce regard, Philippe Leuckx l’a plus que croisé, il l’a traversé. Et ce qu’il y a vu, tout au plus profond, c’est l’attente.…
Près de soixante poèmes répartis en six chapitres composent ce nouveau recueil de Philippe Leuckx. Ici, il rassemble des œuvres parues dans diverses revues ainsi qu’inédites. Comme c’est le troisième opus que je recense pour Le Carnet, la curiosité m’a poussé à rencontrer l’auteur sur son lieu d’écriture. Il habite Braine-le-Comte, une maison tenue avec grand soin, à l’instar de ses poèmes et publications. Le bâtiment protège un jardin à l’arrière, tout en longueur, serré par ceux des voisins. À la fois maîtrisé et hirsute, il y prolifère autant de couleurs que de parfums, à l’exemple de la prolifique plume du poète.Le bonheur je veux bienMais quels mots de quelle cavePour écritoire, à mi-chemin entre la rue, urbaine, et sa petite jungle, Philippe Leuckx…
Poète de la simplicité, Philippe Leuckx est l’auteur de plus de cinquante recueils. Cependant, celui-ci sort du lot car il n’est pas le fruit de l’inspiration du quotidien, dont il s’est fait chantre. Les Poèmes du chagrin sont l’enfant d’un deuil, celui de Gaby, sa compagne pendant quatre décennies. Quatre photos, dont un portrait d’enfant sur la couverture, permettent de mettre un visage sur l’aimée.Un deuil connait cinq phases à la fois psychologiques et sociales. Pour surmonter la vertigineuse chute d’un décès, l’écriture permet de les dominer, voire de les transcender. A fortiori pour une auteur tel que Philippe Leuckx. Avec plus de quatre-vingts poèmes, tous les degrés de la douleur semblent traversés, exprimant leurs cruelles humeurs dans le grand désordre…
En poésie, le mouvement de fermeture n’implique pas forcément l’hermétisme. L’expression poétique se condense à l’extrême, atteint une incandescence nucléaire. Toute forme brève devient ainsi une trouée, si moindre soit-elle, ouvrant sur une infinitude insoupçonnée. Chaque mot en est pesé et acquiert une portée, comme on le dit des projectiles, mais qui ici redonneraient vie et sens.Dans son dernier recueil, Philippe Leuckx nous faire pénétrer la nuit close. Un tel titre méritait de figurer au catalogue d’un éditeur qui lui fasse écho ; Bleu d’encre s’est sans doute imposé comme une évidence… L’objet qui en résulte est sobre, éthéré et beau, avec sa couverture saturée de blanc, contradiction visuelle à l’obscurité annoncée. Vingt-cinq sizains…
Le dernier recueil du poète hennuyer Philippe Leuckx paraît chez Dancot-Pinchart, une nouvelle enseigne, créée par Pierre Dancot et Nicolas Pinchart. Leur maison est, nous dit la quatrième de couverture, « née des terres noires du romantisme et de la liberté folle du surréalisme ». Elle fait la part belle « à l’écriture spontanée à l’épiderme chaude, révoltée et amoureuse. »Philippe Leuckx y « prend mot » dans un texte où « solitude » revient avec une obsédante régularité, rythmant de tout ce qu’il contient de détresse, d’interrogation et de gravité cet ensemble émouvant de textes courts, justes et sensibles. La lumière sera pourtant au bout du cheminement du poète qui retrouvera dans l’évocation de l’enfance et dans l’écriture la…
Second volume publié dans la jeune collection « à cœur d’écrits » lancée par les éditions Le coudrier, ces « entrelus » du critique et écrivain Philippe Leuckx font suite au premier recueil de textes publiés par Jean-Michel Aubevert. Le pari de cette initiative est à souligner puisqu’il s’agit ici de rassembler sous forme d’anthologie, des textes critiques d’auteurs qui rendent hommage à leurs confrères et consœurs en proposant une lecture intime et personnelle de leurs œuvres.Forcément subjectifs, les choix proposés ont néanmoins le mérite de dresser une cartographie de textes d’auteurs belges qui invite le lecteur à suivre les sentes parfois peu connues de notre littérature. Outre la promotion de nos lettres et l’incitation à découvrir de nouvelles…
Poète prolifique (dans la notice le concernant, à la fin de ce volume, il faut pas moins de quatre pages pour faire l’inventaire partiel de ses publications) Philippe Leuckx nourrit d’amitiés poétiques.On sait la générosité avec laquelle il rend compte du travail de ses consœurs et confrères dans des articles, des rencontres littéraires, des préfaces. Ce sont ainsi deux de ces complices qui ornent le dernier recueil en date : Philippe Colmant photographie des ciels de soir tandis que Jean-Michel Aubevert ouvre le livre avec une préface dont la poésie tend un miroir fraternel à la détresse qui hante Matière des soirs.Leuckx empreinte à la mélancolie souterraine, ces éclats de lumière que deviennent les poèmes courts, scintillants évoquant l’absence, le deuil,…
Avec Philippe Leuckx, de recueil en recueil, le poème grave sur la page du sensible des mots clés qui inspirent le cheminement d’encre souvent mélancolique et désabusé, d’un auteur que la poésie semble plus que jamais consoler d’une mélancolie fertile.Les souvenirs sont là, maisons communes / des silences et des deuils / avec la mémoire lourde / des ombres traversées. Deuils, mémoire, silence, ombres heureusement trouvent un peu de lumière lorsque, comme une petite neige, (…) la poudre des mots / éclaire quelque route.Le deuil omniprésent conduit la main du poète, conversant d’oubli /avec l’absente. Il a beau essayer, on reste de soi à soi / sans parole ; il nourrit la solitude des soirs obscurs, donne sa teinte anthracite à l’écriture : Un ciel sombre /…
Les éditions Al Manar, sous la direction d’Alain Gorius, publient non seulement des livres de très belle facture, mais ils sont aussi consacrés à l’espace méditerranéen : auteurs et autrices du Maghreb ou du Machrek et livres d’auteurs d’ailleurs ayant pour thématique ou évoquant des lieux de la Méditerranée et de son pourtour. C’est le cas de ce dernier recueil de Philippe Leuckx, né d’un séjour à Rome et mentionnant aussi la ville portuaire de La Spezia : il n’y faut pourtant pas voir un récit ou des poèmes de voyage au sens premier du terme. Le traceur d’aube, qui est aussi un traqueur d’ombre, est à la fois le voyageur et le poète, confondus tous deux dans la même recherche d’un espace intérieur. La ville, la chambre, les murs y sont les traces tangibles,…