Comme elle l’a elle-même noté dans la notice autobiographique de son blog, Liliane Schraûwen mène une existence pétrie de littérature, que ce soit sur le plan professionnel – n’a-t-elle pas exercé les métiers de « courriériste, journaliste, correctrice, directrice de collection chez Marabout, bibliothécaire, coach littéraire, « nègre », enseignante » ? – mais surtout au fil d’une œuvre qui s’enrichit avec régularité, là d’un roman, ici d’un recueil de proses plus brèves, ailleurs de « chroniques » sur les grandes affaires criminelles belges….Les nouvelles qui composent À deux pas de chez vous se situent à la confluence de son double attrait pour l’écriture de fiction concise et le fait divers. Chacune des histoires se voit en effet précédée…
Si écrire, c’est entre autre faire parler les pierres, alors, le dernier recueil de Liliane Schraûwen est une gemme délicate polie par la gouge des mots. Mais les pierres ne sont pas toujours précieuses. Elles le deviennent après que l’on a redonné vie aux vestiges, après avoir fait renaître leur mémoire, après avoir allégé cette « masse lourde de dure pierre » comme pour en extraire la vie.Alors il est venu / creuser la roche dure / Il t’a trouvée où tu rêvais / de ton rêve de pierre / Tu as pris vie entre ses doigts / et déployé ta chevelure / comme une flamme dans le ventLes ruines, témoins du temps qui file, pierres ancestrales que le vent érode et fait revivre sous les coups de burin de ses caprices. Des rafales qui redressent les vestiges, qui réaniment les…
Frissons nerveux, étourdissements, syncope. Tels étaient les manifestations du mal appelé « petite mort » à l’époque d’Ambroise Paré. Celle-ci donnait en quelque sorte un aperçu de l’absence totale dans laquelle plonge la « grande », elle définitive (du moins, officiellement). Cette disjonction neuronale a par la suite été pénétrée par le langage érotique pour n’envelopper que la rupture de conscience, le hiatus de contrôle, l’électricité disruptive qu’est l’orgasme.Les nouvelles d’Exquises petites morts explorent ce moment, parfois délicieusement douloureux ou douloureusement délicieux : « C’est si bon quelquefois […] de laisser grandir en soi la douleur en même temps que le vertige, de les faire naître l’une de l’autre, ensemble, au…
André est un homme de trente-deux ans assis seul sur une chaise dans une pièce vide où il se sait observé par des personnes habillées en blanc. Nous plongeons ainsi dans les réflexions de cet individu mystérieux étranger à lui-même et au monde qui l’entoure.Touché régulièrement par des absences de quelques minutes à plusieurs heures, il ne sait pas ce qui advient de lui lorsqu’il s’enfonce dans ce qu’il appelle le néant. Il parle peu voire pas du tout, n’exprime pas de besoins et ne comprend pas les codes sociaux des êtres humains, qu’il se contente d’imiter car il a déduit que c’était ce qu’on attendait de lui.Nous comprenons assez vite qu’André a commis un acte criminel grâce à des fragments laconiques et aux notes prises par le médecin qui l’observe…