Chœurs en exil, de Nathalie Rossetti et Turi Finocchiaro

Si tu vas aujourd’hui en Arménie, tu entendras chanter les fantômes. La réparation, c’est d’abord une question politique, une question de justice. Mais il peut y avoir aussi une réparation spirituelle qui donne des forces, de la patience. Le long-métrage de Nathalie Rossetti et Turi Finocchiaro témoigne de la possibilité d’une telle réparation spirituelle, au-delà du deuil et du déni, cent ans après le génocide des Arméniens.

Pendant sept ans, ils ont suivi Aram Kerovpyan et sa femme Virginia dans leurs déplacements avec la chorale Akn qu’ils ont fondée pour transmettre les chants liturgiques arméniens aux communautés de la diaspora.

Leur rencontre avec le metteur en scène polonais, Jarek Fret de l’institut Grotowski à Wroclaw a été décisive dans la conception du film. Le théâtre Zar réunit des acteurs français, italiens, danois et polonais. Jarek a demandé à Aram et à Virginia d’accompagner les membres de sa troupe sur les lieux qui ont vu naître…

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À PROPOS DE L'AUTEUR
Serge Meurant

Auteur de Chœurs en exil, de Nathalie Rossetti et Turi Finocchiaro

"Je suis né à Ixelles, le 8 février 1946. Mon enfance fut heureuse. Je grandis dans un milieu intellectuellement privilégié. Mon père, René Meurant, était poète et folkloriste. Ma mère, Elisabeth Ivanovsky, était venue de sa Bessarabie natale (Kichineff) étudier l’illustration à La Cambre. Elle fut et demeure pour moi la source d’un imaginaire inépuisable.
Les amis de mes parents se réunissaient dans la cuisine familiale. Parmi eux, l’éditeur Georges Houyoux, le poète Pierre-Louis Flouquet, Zinaïda Schakovskoi, grande dame de l’émigration russe et Ania Staristky, la fidèle amie de ma mère.
Nous étions trois enfants et chacun d’entre nous profita de ce terreau. Mon frère Georges est un peintre d’une grande rigueur dans la poursuite de son œuvre lumineuse.
J’ai, depuis l’adolescence, toujours pratiqué l’écriture poétique comme un exercice vital.
La poésie constitue ma colonne vertébrale. Elle est mon souffle et ma raison d’exister. Je n’ai jamais douté fondamentalement de son efficacité à traduire les événements qui ont marqué mon existence et le « monde abîmé » qui est le nôtre.
Les titres de mes livres fournissent déjà quelques clés de mon univers : Le Sentiment étranger, Vulnéraire, Souffles, Brasier de neige, Visages, Le don, Ici-bas… L’évolution de ma poésie, parfois sombre et tourmentée, toujours jaillie de la vie concrète, réclame d’avantage de lumière. Elle allie l’expérimentation de la langue à la précision de l’expression de l’humain, sous toutes ses formes, des plus personnelles aux plus anonymes.
La collaboration avec des peintres, des sculpteurs, des graveurs, des musiciens et des cinéastes m’enrichit, elle ouvre mon regard à la beauté mortelle, d’une manière plus sensible, plus concrète.

Deux livres et deux auteurs que j’aime et que je propose au lecteur :
Le poème continu de Herberto Helder
La flûte aux souris d’Alexis Remizov"Serge Meurant
  • Le sentiment étranger, Bonaguil, 1970.
  • Au bord d'un air obscur, Fagne, 1971.
  • Devant neige attablés, Transédition, 1974.
  • Mais l'insensibilité grande, Le Cormier, 1975.
  • Souffles, Le Cormier, 1978.
  • Dévisagé, Le Cormier, 1984.
  • Vulnéraire, Le Cormier, 1981.
  • Etienne et Sara, Editions du Noroit, 1984.
  • Tête perdue, Le Cormier, 1985.
  • Supplie anonyme ce dos, Brandes, 1988.
  • À perte de vue, la lumière, Le Buisson Ardent, 1991.
  • Brasier de neige, Editions de la différence, 1993.
  • Solstices, L'Arbre à paroles - L'Orange bleue, Amay, 1995.
  • Passage Lumière, La Pierre d'Alun, Bruxelles, 1996.
  • Poèmes écrits pour la main gauche, Le Cormier, Bruxelles, 1997.
  • Appel allégresse, L'Arbre à paroles, Amay, 2000.
  • Le monde abîmé, Le Taillis Pré, Belgique, 2001.
  • Elisabeth Ivanovsky : Conversation avec Serge Meurant, Editions Tandem, Gerpinnes, 2001. Coll. "Conversation avec" ; n°35.
  • Visages, Poèmes 1995-2001, L'Arbre à paroles, Amay, 2002.
  • Miroirs,  Ed. Tandem, Belgique, 2002.
  • Le don, Le Cormier, Bruxelles, 2004.
  • Ici-bas, Le Cormier, Bruxelles, 2006.
  • Corps et âme, Le Cormier, Bruxelles, 2007.
  • Une saison en éclats, Esperluète éditions, 2009. (Gravures de Kikie Crèvecoeur).
  • Célébration, Le Cormier, 2009.
  • L'Orient des chemins, Esperluète, 2012. Photographies de Jacques Vilet.
  • Ceux qui s'éloignent, Le Cormier, 2014.


  • FIRST:film voyage perfection - "Chœurs en exil, de Nathalie Rossetti et Turi Finocchiaro"
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La performance de Oscar Isaac y est pour beaucoup : il exprime l’incompréhension et l’accablement de son personnage face à l’infortune avec une justesse dans laquelle on peut aisément se reconnaître. Pour toutes ses fautes en tant qu’être humain, il semble injuste d’être né sous une aussi mauvaise étoile.                                                            * En cela, Inside Llewyn Davis est en parfaite cohérence thématique et narrative avec la filmographie des frères Coen. C’est le propre de leur cinéma que de mettre en scène des personnages souffrant inlassablement de hasards absurdes et de coïncidences trop grosses pour être vraisemblables. Le monde tel qu’ils le conçoivent est dangereux et arbitraire, et qu’on interprète les événements s’y déroulant comme la démonstration d’une (vicieuse) justice divine, ou comme la preuve de l’absence de Dieu, ne change pas grand-chose : les « péchés » des personnages sont tous aussi souvent punis qu’impunis, et la vie se montrera d’une manière ou d’une autre injuste. On retrouve dans Inside Llewyn Davis quelques personnages typiques des Coen, à savoir ces figures bourgeonnantes et comiquement irritables qu’on leur connaît bien. Personne n’aura oublié Please Mr. Kennedy, ce morceau musical d’anthologie dont le caractère génialement risible se double d’une terrible ironie : la chanson, auquel Llewyn ne participe que pour des raisons financières, recevra probablement plus de succès que n’importe quelle autre composition concoctée par ses soins. Si humour il y a dans le film, il en est indéniablement la victime principale et, il faut bien l’avouer, le désespoir et la mélancolie qui se dégagent de sa situation sont telles qu’il devient parfois difficile de distinguer la comédie du simple drame. Est-ce que traverser plus de mille kilomètres en voiture (et presque autant d’embûches) afin de rencontrer un producteur de musique, pour finalement s’essuyer un refus sans ambiguïté de sa part, est purement et simplement une tragédie, ou une blague cosmique particulièrement cruelle ? Aux spectateurs d’en décider. Aucune blague/tragédie n’est plus perverse et évocatrice que celle qui survient dans les dernières minutes du long métrage. Après ses multiples épreuves (dont un aller-retour à Chicago, un départ avorté vers une nouvelle vie, et littéralement un avortement), Llewyn retourne au café-concert où le film avait débuté, et irrité par son horrible semaine, ainsi que passablement éméché, il perturbe de ses insultes la performance d’une dame d’un certain âge. Comme c’est à chaque fois le cas, ses actions reviennent le hanter, pas plus tard que le soir suivant d’ailleurs. Alors qu’il vient d’achever Hang Me, Oh Hang Me devant le public, Llewyn fait une rencontre familière : celle d’un homme, visiblement contrarié des moqueries que le musicien a fait subir à son épouse la veille, et qui ressemble à s’y méprendre à celui qui lui avait administré une raclée au début du film. Son visage est difficile à distinguer et les positions de la caméra ne sont pas exactement les mêmes, mais la séquence est quasiment identique à la première, en dialogues et en contenu, et le résultat est le même : Llewyn gît par terre, les côtes douloureuses. Une telle répétition d’événements peut sous-entendre beaucoup d’interprétations. On pourra bien sûr y voir une occurrence surnaturelle, qui supposerait que Llewyn répète inlassablement la même semaine. Ce n’est pas une hypothèse que le film défait complètement, et il y a certainement une part d’onirisme dans la mise en lumières et dans la construction du montage, mais cette répétition sert surtout d’allégorie, encapsulant le fonctionnement de la vie de Llewyn. Notre anti-héros est en toute apparence destiné à souffrir pour ce qu’il a fait par le passé, et à répéter les mêmes erreurs, semant ce qu’il récolte et récoltant ce qu’il sème dans un cycle sans fin. La référence la plus évidente ici semble être Sisyphe, cette figure de la mythologie grecque qui chaque jour doit faire rouler un rocher en haut d’une colline pour voir, une fois arrivée au sommet, le rocher retomber tout en bas, avec l’obligation de recommencer sa tâche pour l’éternité. Llewyn apparaît lui aussi condamné à répéter continuellement ses épreuves, pour finalement se retrouver dans la même situation qu’au départ, sans aucune preuve de ses efforts. Cette interprétation est bien sûr sujette à discussion. L’apparition sur scène après le passage de Llewyn de la silhouette très reconnaissable de Bob Dylan marque une différence notable entre le début et la fin du récit. Historiquement, sa célébrité a donné un coup de fouet au folk, et son introduction dans les derniers instants du film annonce indéniablement la popularisation à venir de ce genre musical. De là à dire que ce changement permettra au personnage principal de briser le cycle dans lequel il est enfermé, cela reste sujet à débat. Une telle ambiguïté est très caractéristique…

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