Mes inscriptions 1945-1963

À PROPOS DE L'AUTEUR
Louis Scutenaire

Auteur de Mes inscriptions 1945-1963

Le 9 juin 1905, est venu au monde, à six heures du matin par un orage de tous les diables, le petit-fils du garde-champêtre surnommé en raison de ses origines Milou dou Français. (Le Pays natal)Jean Scutenaire est né à Ollignies, non loin de Lessines, dans le nord du Hainaut. Enfant unique, il y passera son enfance et son adolescence : Douce tranquillité, monotonie heureuse de mes jours d'enfance. En dehors des morts aux carrières et des grèves qui rougissaient quelquefois les pavés de Lessines à un quart d'heure de là, il n'arrivait jamais rien. (Le Pays natal)Plus tard, il aimera rappeler ces origines picardes (III, 219), et, dans Les Vacances d'un enfant, emploiera de nombreuses expressions provenant de ce dialecte. Bien des inscriptions sont consacrées à ces premières années : ainsi, sait-on qu'il aimait fréquenter les ouvriers-carriers bien plus que les gens riches, qu'il apprit à lire très jeune (III, 208), qu'il aurait voulu devenir boxeur, professionnel de la bicyclette ou infatigable soldat mercenaire (I, 210), qu'il fut rapidement sensible aux charmes féminins (I, 50-51), ... Un de ses professeurs l'encourage à écrire ses premiers poèmes alors qu'il a à peine dix ans.Il fait ensuite des études gréco-latines. Indiscipliné, il gardera une réelle aversion pour le milieu scolaire.De 1919 à 1923, il traverse une longue maladie qui le rendra "à tout jamais démoralisé physiquement" (I, 211). Et toute sa vie sera marquée par une santé précaire, une fatigue persistante.En 1924, ses parents s'installent à Bruxelles. Il étudie le droit à l'Université Libre de Bruxelles, et ce jusqu'en 1929. C'est à cette époque qu'il fait la connaissance des surréalistes bruxellois qu'il ne quittera plus. (I, 245-246)Peu après, il rencontre Irène Hamoir, qu'il épousera deux ans plus tard. Cette écrivain sera présente à ses côtés jusqu'à nos jours.Son diplôme de docteur en droit obtenu, il s'inscrit au barreau où il exerce comme pénaliste jusqu'en 1940. Il aime alors s'occuper des mauvais garçons.A l'occasion de la débâcle de 1940, lors de son exode en France, il fait de nombreuses rencontres avec des surréalistes, ainsi qu'avec des personnalités issues d'autres horizons littéraires, dont Gaston Gallimard. (I, 185-188).A son retour, il entre au ministère de l'Intérieur en tant que "commissaire-adjoint aux finances provinciales et communales". Il y restera jusqu'à sa pension, en 1970.La période de la guerre, durant laquelle Scutenaire troque son prénom contre celui de Louis, est sans doute la plus productive de sa carrière. Jugeons-en plutôt :Entre 1939 et 1942, il écrit un second roman, Les Vacances d'un enfant, récit où les réalités sociales de son pays natal sont décrites avec une poésie non dépourvue d'onirisme. Dès 1942, il travaille à un essai sur Magritte.De 1943 à 1944, il rédige un premier tome d'Inscriptions, et poursuit jusqu'en 1946, date à laquelle les deux-tiers de ce qui sera le second volume sont terminés. De ce corpus, il extrait en 1945 un recueil de poèmes en prose, Les Degrés.Dès la fin du conflit mondial, ses oeuvres sont publiées, notamment chez Gallimard, où Eluard a présenté le premier tome de Mes Inscriptions. Il participe aussi à de nombreuses revues.Puis son activité décroît : s'il contribue encore à des revues, c'est de manière plus épisodique; il signe quelques tracts, des préfaces d'expositions ou d'ouvrages.En 1963, le second volume des Inscriptions est terminé. Il ne paraîtra qu'en 1976 : "Gallimard avait accepté de publier le second volume, qui couvre les années 1945-1963. Mais je devais supprimer quatre inscriptions, que Monsieur Gaston avait trouvées grossières, plates, à la belge quoi.Les deux dont je me souviens sont celles-ci: la première avait le tort de s'attaquer à Madame de Lafayette à une époque où le petit monde parisien relisait son célèbre ouvrage : "Relu hier soir La princesse de Clèves. Avec mon cul." L'autre : "Je voulais écrire quelque chose sur le Rig-Véda. Mais je ne sais pas quoi." Et chez Gallimard, on a cru que je raillais un de leurs collaborateurs, qui avait écrit sur le sujet. Quoi qu'il en soit, j'ai refusé. C'était tout ou rien. Ce fut rien. Finalement, grâce à Tom Gutt et Isy Brachot, ce deuxième volume a été publié à Bruxelles en 1976. Ils ont aussi publié le troisième volume, celui des années 1964-1973. Et le quatrième tome a fait retour à Paris, grâce à Jean-Claude Simoën, en avril 1984." (Plein Chant, p.36) A partir de 1968, certaines oeuvres de jeunesse sont éditées. Depuis, chaque année connaît son lot de plaquettes, de petits ouvrages, généralement illustrés, dont souvent des extraits sont repris dans les volumes de Mes Inscriptions.Dans ses dernières années, Scutenaire assiste à la publication (ou à la réédition) de ses oeuvres majeures. Par ailleurs, les plaquettes continuent à nous livrer le fruit de ses travaux récents. Pourtant, il avoue travailler moins : "Pour le moment, je ne fais pas trop... Je deviens vieux, je ne bouge plus guère, je n'écris plus guère non plus. De toute façon, ça n'a pas d'importance, que j'écrive ou non".Couronné trois ans plus tôt par le Grand Prix Spécial de l'Humour Noir, Scutenaire meurt le 15 août 1987, dans son fauteuil.Irène Hamoir raconte que, le lendemain, une tourterelle a désespérément tenté de pénétrer dans leur maison.
NOS EXPERTS EN PARLENT...
Le Carnet et les Instants

À l’instar de Paul Nougé et Marcel Mariën, Louis Scutenaire (1905-1987), « Scut » pour les intimes, mena jusqu’au bout « l’expérience continue » du surréalisme. Mes Inscriptions 1945-1963, qui reparaissent au catalogue d’Allia, attestent de cette dynamique particulière, en somme assez spécifique aux surréalistes belges, où le « primum vivere » semble l’emporter sur l’impérieux devoir de « faire œuvre ». Se tenir debout, pour Scut, n’était pas une posture d’écrivain, juste une position naturelle.Le recueil frappe par la cohésion de sa tonalité et sa puissance expressive. À ceux que rebuterait l’idée de se coltiner la lecture d’un peu plus de 320 pages d’aphorismes, il faudra répondre qu’ici, c’est…


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